L’optimisation fiscale et la directive européenne DAC 6 : enjeux juridiques et transparence

Face à l’évasion et l’optimisation fiscale, les États membres de l’Union européenne ont adopté la directive DAC 6 (Directive sur l’Administration Coopérative) en vue de renforcer la transparence et la coopération entre les administrations fiscales. Cette directive soulève de nombreux enjeux juridiques pour les entreprises et les intermédiaires, notamment en matière d’obligations déclaratives et de sanctions. Dans cet article, nous aborderons les principales dispositions de cette directive ainsi que leurs conséquences pour les acteurs concernés.

La directive DAC 6 : présentation et objectifs

La directive DAC 6, adoptée le 25 mai 2018, constitue la sixième étape du processus d’amélioration de la coopération administrative dans le domaine fiscal au sein de l’Union européenne. Elle vise à mettre en place un mécanisme d’échange automatique d’informations entre les États membres concernant les dispositifs transfrontières devant être déclarés par les entreprises et les intermédiaires (avocats, experts-comptables, consultants).

Ces dispositifs sont considérés comme potentiellement agressifs sur le plan fiscal lorsqu’ils répondent à certains critères appelés « marqueurs ». Leur déclaration permet aux administrations fiscales d’avoir une connaissance préalable des schémas d’optimisation mis en place par les contribuables, facilitant ainsi leur contrôle et leur lutte contre l’évasion fiscale.

Les dispositifs transfrontières concernés

La directive DAC 6 s’applique aux dispositifs transfrontières, c’est-à-dire aux opérations, accords, conventions ou autres arrangements impliquant plus d’un État membre de l’Union européenne ou un État membre et un pays tiers. Ces dispositifs doivent être déclarés lorsqu’ils présentent des indices de planification fiscale agressive.

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Les marqueurs prévus par la directive sont classés en deux catégories : les marqueurs généraux et les marqueurs spécifiques. Les premiers concernent notamment les dispositifs qui ont pour effet de contourner les obligations déclaratives ou d’échange d’informations, tandis que les seconds visent des situations particulières, telles que l’utilisation abusive de pertes fiscales ou la conversion de revenus en capitaux.

Les obligations déclaratives des intermédiaires et des contribuables

Sous peine de sanctions, la directive DAC 6 impose aux intermédiaires (avocats, experts-comptables, consultants) et aux contribuables concernés de déclarer les dispositifs transfrontières soumis à l’obligation de déclaration. Cette déclaration doit être effectuée dans un délai de 30 jours à compter du jour où le dispositif est mis en place ou devient disponible pour sa mise en œuvre.

Lorsque plusieurs intermédiaires sont impliqués dans un même dispositif, ils sont tous tenus de déclarer l’opération. Toutefois, un intermédiaire peut être dispensé de cette obligation s’il apporte la preuve qu’un autre intermédiaire a déjà procédé à la déclaration. En outre, les contribuables sont également tenus de déclarer les dispositifs transfrontières lorsqu’ils ont recours aux services d’un intermédiaire situé dans un pays tiers ou lorsque la législation nationale prévoit une exception pour les avocats en raison du secret professionnel.

Les sanctions et leur portée

La directive DAC 6 prévoit que les États membres doivent adopter des sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives » en cas de manquement aux obligations déclaratives. Ces sanctions varient d’un État membre à l’autre et peuvent prendre la forme d’amendes, de pénalités administratives ou même de sanctions pénales.

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Il est important de souligner que les intermédiaires et les contribuables concernés doivent se conformer non seulement à la législation de l’État membre dans lequel ils sont établis, mais aussi à celle des autres États membres impliqués dans le dispositif transfrontière. Cette situation peut entraîner des difficultés pratiques et juridiques pour les acteurs concernés, notamment en cas de divergences entre les législations nationales.

Conclusion

La directive DAC 6 constitue une avancée majeure dans la lutte contre l’évasion et l’optimisation fiscale au sein de l’Union européenne. Elle renforce la transparence et la coopération entre les administrations fiscales et impose des obligations déclaratives aux entreprises et aux intermédiaires impliqués dans des dispositifs transfrontières potentiellement agressifs. Toutefois, la mise en œuvre de cette directive soulève également des enjeux juridiques importants pour les acteurs concernés, qui devront s’adapter à un cadre réglementaire complexe et évolutif.